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19. Ici Londres

  

ICI WALLONIE

 

 

 

ICI LONDRES !

 

L'entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché com­mun a provoqué de curieux reportages dans les journaux, à la radio et à la télévision.

Allons-y, à notre tour, de quelques croquis londo­niens.

C'est en 1919 que, pour la première fois, nous abordâmes la capitale britannique. Nous eûmes l'aubaine d'y trouver un ami italien tenant un hôtel-restaurant dans le quartier de la Presse. Il s'appelait Molinari. Chaque année, à Stamford-Bridge, il mettait en jeu un challenge d'athlétisme portant son nom. De suite, nous fûmes liés. C'était précieux.

Molinari nous confia : «Vous parlez bien l'anglais, mais on ne vous comprend pas ». A la vérité, nous parlions un langage de dockers, un idiome très vulgaire. A Saint-James Park, Molinari nous montra une vieille dame escortée d'une demoiselle de compagnie. Oh ! surprise ! C'était l'impératrice Eugénie de Montijo, épouse de Napoléon III, née à Grenade en 1826, et qui devait mourir à Madrid en 1920. Comme nous regardions volontiers les jolies filles (hélas ! mal vêtues) notre cice­rone nous cita un proverbe local «Ne jamais courir après une femme, ni un omnibus. Il en vient toujours derrière, à la longue».

 

Londres, à cette époque, était encore victorienne avec ses cabs, cabriolets, dont le cocher se dressait à l'arrière sur un siège surélevé, et avec ses autos hautes sur roues. Les femmes portaient toutes un chapeau invraisemblable, et même pour laver leur seuil, les ménagères, à genoux, se coiffaient d'une casquette !

Le dimanche s'écoulait, funébre. Les familles s'assemblaient autour de la théière, comme autour d'une urne contenant les cendres de leurs ancêtres.

Grâce à Molinari, qui fréquentait les journalistes, nous assistâmes, gratis, au match de boxe Carpentier- ­Beckett.

Derrière nous, se tenait un gentleman en smoking et fumant un cigare à la Churchill.

Au coup de gant, le dit spectateur laissa choir son cigare et le chercha sous les banquettes.

Quand il se releva, le match était fini. Carpentier avait mis K.-0. son adversaire en 75 secondes.

En 1923, nous assistâmes à ce spectacle incroyable de l'inauguration du stade de Wembley. 200.000 personnes déferlèrent jusque sur la pelouse. La police montée balaya le terrain de football, mais, pour tirer les corners, elle devait charger la foule afin de dégager l'arc de cercle classique.

 

Nous retournâmes souvent à Londres, même dans le brouillard.

Nous venons de relire une page intitulée « Londres, tel qu'en nous-mêmes», d'Alexandre Vialette, parue autre­fois dans «Le Figaro littéraire». Extrayons-en des réflexions cocasses «En haut de la tour de Londres, habite Sherlock Holmès, ministre de la Justice. Il, coupe en cas de besoin, la tête aux femmes des rois. Six corbeaux se tiennent sur sa fenêtre, appointés par le gouvernement.

A l'heure des lampes, dans une ruelle sordide, un lord en frac assassine une danseuse pour compléter sa collec­tion de tutus.

A la porte d'un pub, dans une rue vide, on voit une vieille dame sur le dos. Comme un hanneton. Elle est raidie par la boisson et n'agite plus que faible­ment les pattes. Tous les vingt kilomètres, on rencontre un homme aux yeux hagards, desséchés par la marche. Il cherche depuis huit jours quelqu'un à qui parler. Quand il tombe de fatigue, on le balaye au matin et on le jette dans une voiture municipale».

 

Londres a changé, mais l'incroyable y est toujours vrai !

 

Georges REM.

 



09/10/2010
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