50. Sévère mais juste
ICI WALLONIE
Tchantches
SEVERE MAIS JUSTE !
Il nous souvient, c'était comme on dit « dans le temps ».
La neige tombait sur notre vieux jardin ; et, bien au chaud, notre mère, très malicieuse et très musicienne, nous donnait une leçon de piano à laquelle nous répondions fort mal.
Elle s'arrêta brusquement, nous regarda d'un air ironique et nous dit :« Mon fils tu verras la fin du monde après que les hommes auront marché à quatre pattes pour brouter l'herbe et manger du foin. Ils grimperont ensuite aux -derniers arbres ».
Elle se trompait, évidemment, et voulait dire la fin... d'un monde.
Nous sommes en train de la vivre. Ce n'est pas gai !
Mais il faut s'habituer à tout.
Néanmoins, nous avons devant nous la reproduction d'une lettre qu'un lecteur, M. Raymond Donnay, de Vottem, professeur de son état avait envoyée au début de l'an 72 à M. H. Buchet, directeur de l'Ecole d'Art de Florenville.
M. Donnay nous a autorisé à reproduire des extraits de sa longue missive traitant de l'art en général et de la poésie, de la littérature, de la peinture, de la sculpture en particulier.
Evidemment, il est encore et par bonheur des gens sensés, mesurés et logiques mais M. Donnay a visé juste lorsqu'il nous dit :< Le candidat lecteur ouvre-t-il, un recueil moderne ? Neuf fois sur dix qu'y rencontre-t-il ? Un langage incompréhensible, parfois démentiel ! Alors, rapidement découragé ou dégoûté, il se détourne. Voilà la cause !
Et ce ne sont pas les haussements d'épaules, les attitudes supérieures ou les discours abscons des pédants et des fumistes qui le feront changer d'opinion.
Si les soi-disant poètes ne trouvent aucune audience, qu'ils s'en prennent à eux-mêmes. D'autre part, on barbouille des toiles comme à l'école gardienne, on expose des sculptures «informes» sensées représenter quelque chose.
Les « musiciens » écorchent les oreilles par leur cacophonie et finiront bien par taper sur des chaudrons, les « chanteurs » débraillés braillent. Le théâtre présente des pièces de plus en plus abracadabrantes et ainsi de suite.
Seuls les sots ou les snobs - ce qui revient au même - s'y laissent prendre.
Les temps futurs se moqueront de notre époque désaxée qu'ils considéreront certainement comme l'une des plus stupides de toute l'histoire.
J'ai parcouru dernièrement des anthologies de poésie moderne. C'est à mourir de rire ou à devenir malade. Tous ceux à qui je les ai montrées se sont esclaffés.
Plusieurs ont eu des mots blessants pour maints auteurs.
Je ferai remarquer en terminant que pour exposer mon point de vue, j'ai usé normalement d'une langue correcte, simple et claire. M'aurait-on compris si je m'étais exprimé à la mode des pseudopoètes ?
Patience !
Nous, les simples, finiront forcément par avoir raison quand le monde aura retrouvé sa tête ». Mais la retrouve-t-i1 ?
Georges REM.